Soif d’ici – Histoire de foi
Soif d’ailleurs avec Nadia
Qu’on se rassure, je n’ai pas oublié un « e » à la fin du mot. Aucune envie de me plaindre de ma condition hépatique en ce 1er juillet. Plutôt envie d’une profession de foi.
La semaine dernière, la grande famille de Chacun Son Vin / WineAlign était réunie à Penticton, en Colombie-Britannique, pour la tenue des National Wine Awards of Canada, la plus importante compétition dédiée aux vins canadiens.
Pour les membres du jury, ce rendez-vous annuel est une occasion en or pour prendre le pouls du vignoble canadien et échanger avec les vignerons de la région hôte. C’est aussi un excellent prétexte pour se revoir et pour s’amuser un peu, accessoirement. L’ambiance en sérieuse de jour – compétition et travail obligent –, mais légère et festive de soir.
Chaque édition des NWAC a aussi sa trame sonore. Et celle de cette année aura très largement été marquée par Faith. Bientôt quatre jours que je suis rentrée et la chanson de Georges Michael tourne encore en boucle dans ma tête. Sans arrêt. Mais juste le refrain:
« Cause I gotta have faith, faith. I gotta have faith, faith, faith. »
À force, et en relisant mes commentaires sur l’ensemble des vins de cet article, j’y fini par y voir une certaine signification ou une heureuse coïncidence, c’est selon. En fait, je n’ai jamais autant eu foi en l’avenir du vignoble canadien et plus j’y pense, plus je crois qu’il est parmi les plus porteurs du Nouveau Monde. Voilà, c’est dit.
Je ne connais pas encore les résultats de nos séances intensives de dégustation à l’aveugle – plus de 1500 vins étaient inscrits cette année –, mais je peux d’emblée vous dire ceci: l’avenir aura bon goût. Très bon.
#GoGamayGo
Certains cépages suscitent évidemment plus d’enthousiasme que d’autres. Parmi nos favoris de cette présente édition on trouve quelques classiques du vignoble canadien comme le pinot noir et le chardonnay, mais aussi quelques variétés encore trop méconnue, comme le riesling, le cabernet franc, le pinot gris et… notre chouchou, le gamay.
Des 14 médailles platine attribuées l’année dernière, trois ont été décernées à des vins de gamay. C’est plus de 20 % et ça n’a rien de bien surprenant: le gamay est fait pour le climat continental de Niagara.
De plus en plus de producteurs le reconnaissent et misent à fond sur ce cépage essentiellement cultivé dans la région française du Beaujolais. Parmi eux, le domaine Malivoire, où Shiraz Mottiar produit ce très bon Gamay 2014 (20,90 $); juteux, débordant de fruit et soutenu par une saine acidité. L’exemple même d’un bon vin rouge de soif; encore meilleur s’il est servi légèrement rafraîchi.
Pinot noir et chardonnay
Le Canada semble aussi taillé sur mesure pour les deux cépages maîtres de la Bourgogne. L’Ontario, plus particulièrement. Le pinot noir est pourtant reconnu pour être capricieux et le chardonnay est, comment dire… souvent si prévisible qu’il en devient presque ennuyant. Mais lorsque plantés au bon endroit, cultivés et vinifiés comme il faut, ils atteignent à Niagara et dans Prince Edward County (PEC) une finesse et une pureté qui pourraient faire l’envie de bien d’autres régions mieux connues, particulièrement chez nos voisins américains.
Le climat de Niagara donne généralement des pinots noirs plus nourris et charnus qu’à PEC. Parmi les beaux exemples du genre, on peut retenir, cette année encore, le Pinot Noir 2013 Lowrey Vineyard (42,75 $) produit par Thomas Bachelder. Le plus achevé des récents millésimes pour cet excellent pinot provenant du secteur de St. David’s Bench.
Plus à l’ouest, et provenant de trois différentes parcelles sur le Beamsville Bench, le Pinot Noir 2013 (35,25 $) de Hidden Bench est impeccable et traduit bien le caractère frais et modéré du millésime 2013. Élégant, tissé de fruit mûr et joliment boisé.
Le chardonnay a aussi trouvé un terrain de jeu rêvé sur la péninsule du Niagara. À la SAQ, retenons les vins de Tawse, où le talent de vinificateur Paul Pender s’exprime même à travers le Chardonnay 2013 (23,50 $) courant du domaine. Habituellement peu plus nourri que la moyenne régionale, le Chardonnay 2013 de Flat Rock Cellar continue de gagner en tension cette année.
Bien qu’un peu plus ample et généreux, le Chardonnay 2014 The Brock de Closson Chase, est assez représentatif des chardonnays produits en bordure de la rivière Niagara. En prévente en ligne depuis hier, le vin sera disponible en succursales à compter du 7 juillet. Et pour goûter aux excellentes cuvées de chardonnay qu’élabore Closson Chase dans Prince Edward County, il faudra encore se rendre au domaine.
Du Québec, on voudra découvrir ou redécouvrir la cuvée Chardonnay 2014, Le Couchant du Vigbnoble Les Pervenches, à Farnham (35 $ – au domaine), mais aussi celui du Domaine St-Jacques – goûté sur fûts cette semaine et très prometteur – (24,95 $).
Cabernet franc
Le financier Morey Tawse est avant tout un amoureux des vins de la Bourgogne – issus de pinot noir et de chardonnay –, mais son domaine est également la source d’excellents cabernets francs, comme le Cabernet Franc 2011 Laundry Vineyard (33,50 $); plus souple, vibrant et accessible en jeunesse que l’ambitieuse cuvée Van Bers 2010 (50 $), disponible exclusivement en ligne.
Le cabernet franc joue aussi un rôle important (75 %) dans le Cabernet 2013 (23,80 $) de Redstone Winery, la plus récente acquisition de Morey Tawse.
Pinot gris et riesling
Chaque année, parmi le lot de vins de Colombie-Britannique dégustés au NWAC, ceux qui me semblent le plus complets sont issus de cépages alsaciens: pinot gris, riesling, gewürztraminer ou pinot blanc. Tout comme l’Alsace, la Colombie-Britannique bénéficie d’un climat sec et d’étés généralement chauds. Malgré une saison végétative un peu moins longue qu’en Alsace, les vins de Colombie-Britannique affichent ce même éclat aromatique. Des vins blancs originaux et racés qui suscitent déjà l’intérêt de critiques internationaux.
À commencer par ce très bon Riesling 2015 de Tantalus (31,50 $); parfaitement sec, d’une minéralité à trancher au couteau et d’une exquise pureté. Plus souple et facile à boire, le Pinot Gris 2014 (24,60 $) de Poplar Grove déploie de jolies notes de lime et de pomme verte. Un bon vin d’apéritif.
Et, contre toute attente, même le vignoble québécois obtient de beaux résultats avec le cépage pinot gris. Goûté (et bu, je le confesse) à trois reprises depuis le mois de mai, le Pinot Gris 2015 du Domaine St-Jacques est l’un de mes vins blancs québécois favoris des dernières années. Du gras, une expression aromatique élégante et une finale saline et désaltérante.
Surveillez de près son arrivée en succursales dans quelques semaines. Si je me fie à l’enthousiasme ambiant lors de son lancement en mai, les quelque 210 caisses devraient s’écouler très vite!
Bon été!
Nadia Fournier
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