Hors des sentiers battus – Janvier 2018

Bourgogne et yoga
par Marc Chapleau

Marc Chapleau

« Bourgogne et yoga », dit mon titre. Le rapport ? Aucun.

Ma nouvelle carrière de yogi, pour commencer, tiens. Souplesse, étirements, tapis spécial mince et antidérapant. Tout est dans la posture et la respiration, je veux bien vibrer avec ça, mais pour le lien avec le grand Tout ou le grand Vide, là, malaise.

S’il n’y a effectivement pas de lien entre cette technique hindoue de relaxation et la Bourgogne, ladite méthode a en revanche un point commun avec la dégustation à l’aveugle. (Et non, esprits mal tournés, rien à voir ici avec le yoga chaud…)

À cause des yeux, qu’on ferme souvent pour mieux se concentrer sur les seules sensations ; alors que dans un cours de yoga, on les garde clos pour mieux focaliser sur sa respiration, le sacrum est ancré bien profond, le sternum vers le haut, le pubis où vous voulez, la mâchoire est relâchée, les yeux, les oreilles, les cheveux sont détachés et menacent à tout moment de tomber… Tout votre corps est dèèètendu, comme dit le prof avec son savoureux accent français.

Ça marche, j’avoue. Mais déguster à l’aveugle itou, ça te replace les chakras. Rien de tel, les sens en alerte au-dessus d’un verre, pour mettre le mental de côté.

La beauté de la chose, c’est que ce même mental embarque par contre tout de suite après à fond la caisse : il faut rationaliser, classer, ordonner le ressenti, traduire ça en mot, partager l’information…

Le meilleur des deux mondes, quoi !

ET LA BOURGOGNE ?

Un mot sur la Bourgogne, à travers le prisme d’un film que je viens d’aller voir : le dernier de Cédric Klapisch, intitulé Ce qui nous lie en Europe et Retour en Bourgogne, ici.

Tout amateur de vin gagnerait à voir cet opus certes parfois bon enfant, prévisible par bouts, mais qui brosse un portrait à la fois juste et flatteur de la vie dans cette prestigieuse région viticole.

Plus que dans Sideways (2004), par exemple, on apprend des choses sur le métier de vigneron, les aléas auxquels ils font face, la météo, leurs finances parfois bancales, le passage (difficile) du témoin aux prochaines générations.

Et les images sont belles, le rythme est bon, il n’y a ni longueur ni véritable lourdeur.

À noter, au passage, que l’acteur français et vigneron Jean-Marc Roulot, établi à Meursault, y joue en quelque sorte son propre rôle, à titre de régisseur du domaine de la fratrie – deux frères, une soeur – qui est au centre du film.

Et aussi, surprise, mon confrère, Patrick Désy, fait dedans une apparition éclair, un caméo comme on dit !

Je blague, mais à peine, tant la ressemblance entre le chroniqueur du Journal de Montréal et le père des protagonistes m’apparaît évidente.

Coucou, Pat !

À BOIRE, AUBERGISTE !

Restons dans le ton, et faisons comme ce que tout le monde disait en sortant de la projection : « Bon eh bien, c’est certain qu’on va boire un bourgogne, ce soir… »

L’action se passe en Côte de Beaune dans le film de Klapisch, mais nous descendrons pour les besoins de la cause un peu plus bas, en côte chalonnaise, c’est parfois aussi bon et moins cher. 

Faiveley Montagny Blanc 2014 – Faiveley persiste et signe, et ce montagny, après une vingtaine de minutes d’aération dans le verre, montre de quoi il est capable. Boisé très bien intégré, de la finesse et de l’autorité en même temps. À 25 $ et des poussières, un excellent rapport qualité-prix. [25,60 $]

Michel Juillot Mercurey Rouge 2015 – Déroutant, au premier abord, avec la note d’acidité volatile qui ressort, mais ce bourgogne rouge est par ailleurs finement boisé et bien typé, léger certes, pas très concentré, mais on ne peut plus digeste. [33,50 $]

Faiveley Mercurey La Framboisière 2014 – Typé pinot noir au nez, de belle façon qui plus est, en finesse ; saveurs profondes et fruitées, peu corsées par ailleurs, épicées et d’une bonne fraîcheur. Prix bien mérité. [36,25 $]

Ailleurs qu’en Bourgogne, en France et aussi en Europe, on trouve actuellement plusieurs autres bonnes bouteilles d’un bon rapport
qualité-prix :

Pascal et Alain Lorieux Thélème Chinon 2012 – Savoureux rouge de la Loire à base de cabernet franc, relativement corsé, avec du gras ainsi qu’une bonne structure acide. Pas de bois par ailleurs, élevage 100 % cuve inox. [26,45 $]

Granaxa Minervois 2014 ­- Excellent languedoc rouge, à la fois fin et serré, avec des notes de tabac blond au nez et des saveurs mi-corsées. Des airs de bourgogne, d’élégance et de fraîcheur, pour cette cuvée cent pour cent grenache. [25,55 $]

Raventos I Blanc De Nit 2015 – Très bon mousseux espagnol (un « cava »), relativement fin, très légèrement brioché, avec une bonne acidité et pas trop de sucre résiduel (très peu, même, seulement 4,4 g), avec du gras aussi, et une texture enveloppée. Très bon rapport qualité-prix. [27,90 $]

Quinta Da Infantado Douro Rouge 2013 – Solide rouge portugais, corsé et concentré, passablement boisé et tannique mais aussi profond, et avec une minéralité sous-jacente. Déjà accessible, mais gagnerait selon toute vraisemblance à vieillir encore une couple d’années. [23,80 $]

Domaine Ferrer Ribière Tradition 2015 – Rouge du Roussillon tout juste corsé, magnifiquement soutenu par son acidité et sa minéralité, beaucoup de fraîcheur c’est dire, et un 14,5 % d’alcool qui passe presque inaperçu. [20 $]

Marc

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