Le pot aux roses

Hors des sentiers battus
par Marc Chapleau

Marc Chapleau

Marc Chapleau

Je force un peu sur le jeu de mots, avec ce « pot aux roses ». J’aurais bien aimé, pourtant, éventer voire éventrer quelque secret, mettre au jour certaine malversation, pointer du doigt telle ou telle machination…

Or pas de ça, non. Vous et moi allons plutôt sagement rester sur le plancher des vaches, au cours des prochaines minutes. Par contre avec un sujet – le vin rosé – tellement, mais tellement tendance.

J’aime le rosé, entendons-nous. C’est un vin de piscine, qu’on boit essentiellement pour se désaltérer, pour remplacer le vin blanc ou sinon la bière.

Pas de panique.

Tout ce que je dis ici, c’est que le vin rosé n’est pas un grand vin. Par ailleurs, comme pour le champagne (lequel peut toutefois tutoyer les sommets, j’en conviens), on le boit très souvent pour ce qu’il représente et ce qu’il connote, plus que pour ce qu’il est vraiment.

Scénario classique : Il fait chaud, il fait beau, on a trimé dur tout l’après-midi, on vient de prendre une douche, on a enfilé les gougounes, on s’écrase dans une chaise sur la terrasse et on s’extasie devant la lumière rasante de fin de journée, sans manquer d’enfourner une grosse poignée de chips. Et là, en se tournant vers sa douce moitié, marquant une pause le temps d’avaler… « Ça te dirait, très chère, un bon verre de rosé ? »

Et là, arrangez ça comme vous voulez mais les oiseaux se mettent à gazouiller.

Le champion des accords vins-mets

Répétition : j’aime le rosé. Souvent aussi, à table, quand le plat pose problème, quand on ne sait pas si c’est un vin blanc ou un vin rouge qui ferait l’affaire, le rosé tire d’embarras. Sa polyvalence est proverbiale.

Bref, c’est un bon soldat.

Parfois, on a tendance à le monter en épingle, à le glorifier, au motif qu’il s’agit d’un vin très technique, très difficile à faire, le vigneron devant doser son affaire au millimètre près et notamment faire macérer juste assez, pas trop, les raisins avec leurs peaux.

Elle est peut-être là, d’ailleurs, la magie du rosé. Requérir autant de soins dans l’élaboration, alors que par définition chacun sait, et le vigneron au premier chef, qu’il s’agit d’une sorte d’hybride, de bâtard, ni tout à fait blanc ni tout à fait rouge.

Peut-être pour cela qu’on l’aime tant, d’ailleurs. Comme pour ces chiens de races mélangées, sans pedigree peut-être mais ô combien attachants.

~

À boire, aubergiste !

La preuve que le rosé et moi ne sommes pas brouillés : je viens d’en goûter une trentaine et, ma foi, il y en a plusieurs que j’ai bien aimés – aucune ironie ici.

Une précision, d’abord : sauf si c’est la canicule, auquel cas il faudra mettre au préalable la bouteille au congélo durant un bon 45 minutes, ne pas servir le rosé trop frais, pas plus qu’un blanc en tout cas. Traduction : aux alentours de 6-8 degrés. Je sais, les meilleurs s’expriment encore mieux autour de 10-12 degrés ; la difficulté est alors de gérer la chaîne de froid, et de s’assurer de ne jamais laisser le vin tiédir.

Voici maintenant ma sélection de rosés pour le festin de homard, coquins, que vous vous apprêtez sûrement à organiser…

Domaine de Gournier Rosé 2016 – À seulement 11,55 $, probablement LE rapport qualité-prix parmi les rosés présentement sur le marché : des notes de fraise et aussi des nuances florales, du fruit en bouche aussi, de la fraîcheur, des saveurs bien détaillées, assez de corps également.

Listel-Gris Sables de Camargue 2016 – Moins cher encore, tout juste au-dessus de la barre des 11 $, ce rosé de Camargue conjugue générosité (d’autant qu’il a une très légère pointe de sucre) et vivacité, sans lourdeur, et avec même une certaine élégance.

Domaine De Gournier Rosé 2016Listel Gris Rosé 2015Le Pive Gris Vin Rosé 2016Jean Luc Colombo Cape Bleue Rosé 2016

Maison Jeanjean Le Pive Gris 2016Impeccable ! Tout y est : le fruit, l’acidité, l’absence (!) de sucre résiduel, une texture étonnamment serrée assortie d’une texture enveloppée. Parmi les rosés et les vins tout court les plus vendus à la SAQ – devant, même, le White Zinfandel de Gallo.

Jean-Luc Colombo Cape Bleue 2016 – Très bon rosé de Camargue, riche et fruité, épicé également, pratiquement sec (2,8 g), précision de l’ensemble.

Domaine du Deffends Rosé d’une Nuit 2016 – Très pâle (typique du rosé de Provence), à peine pelure d’oignon, mais aussi très bon, parmi les meilleurs. Le vin combine finesse et autorité. Délicieux !

Sélection Chartier Le Rosé 2016 – Corps et fraîcheur, un très bon rosé du Languedoc avec du nerf, une bonne longueur aussi. Chapeau ! Seul hic : son prix, près de 20 $. Vu que c’est François Chartier qui est derrière, on n’aurait pas droit à une petite ristourne, t’sais, entre compatriotes 😉

Domaine Du Deffends Rosé d'Une Nuit 2016Chartier Créateur D'harmonies Le Rosé 2016Le Rabault Joseph Mellot Sancerre Rosé 2016Château La Tour De L'evêque Pétale De Rose Rosé 2016

Joseph Mellot Le Rabault Sancerre 2016 – Petit problème : je viens de dire que le rosé de Chartier était une couple de dollars trop cher, et voilà que je recommande, chaudement qui plus est, ce sancerre rosé vendu 26,50 $… Qu’y puis-je ? Ce Rabault à base de pinot noir force l’admiration : corsé, tonique, serré, profond, avec de la mâche et de l’acidité. Miam !

Pétale de Roses Régine Sumeire 2016 – Assurément l’un des meilleurs rosés de la cohorte 2016 à nous être parvenus jusqu’ici. Profondeur, tension (l’acidité), texture serrée, pas de sucre résiduel, persistance notable.

 

Marc

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