Les bons choix de Marc – Février 2016
L’heure des quilles
par Marc Chapleau
C’était la semaine dernière. Je devais aller dans une SAQ Dépôt parce que je voulais acheter un baril de bière de 5 litres vendu exclusivement là-bas, pour agrémenter le party du samedi soir, après un tournoi de quilles avec des copains à Saint-Eustache. (Je sais, je sais, mais avec l’hiver qu’on a, les sports d’hiver sont devenus les sports divers, alors on fait ce qu’on peut.)
J’opte pour la « Dépôt » la plus près de chez moi, celle du Marché Central, à Montréal. J’arrive là, facile de stationner – déjà un bon point pour l’endroit. Une fois entré par contre, hmm, ça fait très entrepôt ; c’est voulu ainsi, je sais ça aussi, mais quand même….
Je me dirige vers la section Bières et j’aperçois de fait mon 5 litres, de la lager tchèque. Mais avant de le mettre dans le panier, je vérifie la date de péremption : mars 2016. C’est dans un mois. En principe elle est encore bonne, mais certainement pas de toute première fraîcheur. J’achète, j’achète pas ? Je regarde ce qu’il y a d’autre côté houblon : une IPA de Colombie-Britannique embouteillée en juillet dernier. Pas de date « meilleure avant ». Mais six mois de bouteille pour une IPA, c’est trop à mon goût. Je repère une autre bière, allemande de mémoire. Pas chère, même que c’en est louche. Un coup d’oeil sous la cannette : Best Before February 2015. Oh my god ! j’espère avoir mal lu.
Bon, faisons une croix sur la bière, et arpentons quelques allées, histoire de prendre le pouls des lieux. Après tout, je n’étais pas venu dans une SAQ Dépôt depuis l’ouverture de la première, voilà bien une bonne dizaine d’années.
Premier constat : difficile de s’y retrouver, de simples caisses grossièrement découpées en guise de présentoirs, les gros carrosses des clients qui gênent la circulation… Bref, après 10 minutes à zigzaguer, je prends mes cliques et mes claques et bonjour la visite. Sans avoir rien acheté. Je prendrai un carton de bières au dépanneur.
Sauf qu’il me faut aussi quelques quilles de vin, pour le party post-bowling. Arrêt donc, sur le chemin du retour, à la SAQ Beaubien, angle Saint-André.
Dieu merci !
Je monte à l’étage, où se trouvent en règle générale les meilleures bouteilles. Et là, tels deux phares, tels deux bouées lancées à ma rescousse, j’aperçois les deux Michel (Beauchamp et Lussier), conseillers en vin de la succursale.
Après une couple de salamalecs – mais je n’embrasse pas Beauchamp tant qu’il gardera sa barbe de prophète -, je me détends, l’énergie vitale recommence à circuler dans mes veines, je me sens en symbiose — enfin ! — avec mon environnement, je suis bel et bien en mode « amateur de vin » et non plus pris dans une spirale bêtement consommatrice et pécuniaire.
Moralité : au diable le « rabais escalier » des SAQ Dépôt et les 15 pour cent de rabais à l’achat d’une caisse de produits.
Je préfère payer le plein prix, et me sentir bien, bien entouré, dans un lieu en harmonie avec mon dada, ma passion.
Une sorte de feng shui, d’art de vivre, et affaire, aussi, d’atomes crochus.
L’expérience d’achat, discuter avec le conseiller, soupeser tel ou tel choix de bouteille, passer du temps à sillonner les allées remplies de beaux produits, croiser d’autres amateurs comme nous, piquer une jasette… ça n’a pas de prix !
P.-S. On me glisse à l’oreille que j’ai beau critiquer, ça marche très fort, les SAQ Dépôt. Tant mieux ! Grand bien leur fasse à tous. Ça n’en demeure pas moins du fast-food. Peut-être pas indigeste, c’est vrai, mais, selon mon expérience, en sortant de là t’as encore faim…
À boire, aubergiste !
Finalement, je suis reparti de l’antre des deux Mike avec diverses choses, et encore une fois j’ai trop dépensé…
Deux rouges sous capsule dévissable, d’abord, je n’apporte plus que cela quand je me rends quelque part pour un souper et que je n’ai pas envie de traîner avec moi de plan B, c’est-à-dire d’autres bouteilles au cas où il y en aurait de bouchonnées.
Au premier chef, le très bon The Wolftrap Syrah-Mourvèdre-Viognier 2014, d’Afrique du Sud : généreux, épicé, plutôt nerveux, à la composante boisée bien intégrée, pas trop appuyée. Belle fraîcheur ! À un peu moins de 17 $, un très bon rapport qualité-prix et le compagnon tout trouvé des viandes, grillées ou braisées.
Puis, du Rhône Nord, le Crozes-Hermitage Équinoxe 2014 : Beau nez engageant, très syrah, l’olive, le poivre. Saveurs à l’avenant, épicées, mi-corsées, rafraîchissantes. Longueur très correcte, par ailleurs, et une finale aux accents boisés et aussi, m’a-t-il semblé, un peu sucrés.
Ensuite, parmi ce que j’ai goûté d’autres récemment et qui m’a semblé fort bon, il y a :
Château de Pennautier Cabardès 2014 — Les rouges de l’appellation cabardès participent de deux mondes : le Languedoc et le Bordelais, tel qu’en témoigne l’assemblage de ce Pennautier, composé de cabernet-sauvignon, de merlot, de syrah et de grenache. Un vin souple et fruité, tout en étant relativement corsé et enrobé. Caractère très digeste, facile à boire, et persistance plus qu’honnête. À environ 15 $, une très bonne affaire !
La Segreta Planeta Sicilia 2014 — Nez engageant de fruit mûr et d’épices, saveurs pas si riches ni corsées en bouche, assez tendues même, avec une bonne acidité sous-jacente, de la fraîcheur. À 17,30 $, un bon achat, qui sera polyvalent à table compte tenu des tannins par ailleurs plutôt aimables.
CAP Wine Pilheiros 2012 — Très bon rouge portugais du Douro, au boisé bien dosé quoique marqué, bien concentré par ailleurs, et avec une acidité relativement élevée, qui donne du tonus au vin. Finale légèrement capiteuse. (21 $)
Gardies Clos des Vignes 2012 — Un rouge du Roussillon au beau nez invitant, au fruité pur, et avec une pointe d’acidité volatile qui ne dépare pas le vin, au contraire. La bouche suit, pleine, corsée, concentrée, bien tendue, bien droite aussi, les saveurs sont bien dessinées. Se laisse boire avec plaisir, et pourrait tout aussi bien vieillir encore quelques années. (33,75 $)
Jacques Tissot Arbois Chardonnay 2011 : Ampleur, fraîcheur, à peine rancio et finement noisetté (si bien qu’à l’aveugle, pas sûr que j’aurais dit Jura). Tout à fait à point par ailleurs. (22,45 $)
Cabernet-Sauvignon Innisfree Napa Valley 2012 : Franchement bon, ce Cabernet de la Napa. Peu de poivron vert au nez (on est en Californie, tout de même), une belle matière en bouche, un boisé appuyé, c’est vrai, mais sans que cela n’engendre de déséquilibre ni n’assèche le vin. Prêt à boire, mais se conservera encore sans problème trois ou quatre ans. Bon rapport qualité-prix. (42 $)
Ça donne le goût d’aller le Golden State, où je serai d’ailleurs la semaine prochaine.
Bonnes dégustations !
Marc
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